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Où l’on entre sans guide, et par l’espoir conduit.
Partout ce sont des fleurs, de beaux apprêts de fêtes…
Mais nulle voix ne vient vous apprendre où vous êtes.
Un somptueux banquet se dresse sous vos yeux,
Mais, pour ce grand festin, nul convive joyeux.
Une douce harmonie à votre cœur résonne…
Inutiles accords qui n’animent personne.
Dans ce séjour magique ouvert à votre espoir,
Nul hôte hospitalier ne vient vous recevoir ;
Car le maître habitant ce palais de lumière
Est un Prince enchanté dont les os sont de pierre !
L’éclat seul est vivant ; les fleurs, les fleurs d’un jour
Son la réalité de ce brillant séjour.
Une espérance ainsi d’un beau rêve suivie
Est la réalité des plaisirs de la vie.
Humble ou fat est celui qui compte des regrets.
Hélas ! l’homme ici-bas fait d’éternels apprêts
Pour la fête du cœur qui jamais ne commence :
Un laboureur parfois se ruine en semence.
Ainsi de jour en jour le grand bal est remis,
Et l’on s’apprête en vain pour le plaisir promis :
Le Temps fuit, emportant l’Espérance parjure,
Et l’on n’a conservé du bal que la parure.

À quinze ans, Napoline avait beaucoup rêvé :
Or ce qu’on rêve bien est autant d’éprouvé.
Dans ses choix de bonheur elle cherchait la gloire :
J’aimais un idéal — elle — aimait dans l’histoire ;
À son amour factice il fallait un grand nom,
Qu’elle allait déterrer dans quelque Panthéon.
Je me souviens encor d’avoir été jalouse
De l’amour exclusif qu’elle eut pour Charles douze.
Il fallait à ses vœux un malheur couronné ;
Elle aimait Charles douze, et moi j’aimais RENÉ.