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— Rouge… fit-il en tâchant de crier moins que d’ordinaire… Rouge… Red… c’est une algue !…

— Elle rapprochait ses sourcils, perdue dans l’indéchiffrable.

A… what ?

— Ça ne fait rien, allez !… Nous n’y arriverons pas.

Il la reprit par les mains, puis glissa ses paumes jusqu’aux coudes. Il admira ses yeux variés. Ils venaient de prendre une autre couleur. Elle pouvait avoir ce visage flétri sous le rouge, cette bouche tombée. Elle avait aussi cette lumière sur la tête et ce regard enfoncé, d’un bleu si sombre et si changeant, et qui semblait en avoir tant vu.

Elle était comme lui, misérablement muette, avec tout ce qu’elle eût voulu lui dire. Le langage de clown recommença.

— Moâ… vénioue. Vous disez moâ : come. Poûquoi ?…

— Moi dire come because want vous voir. Moi, je crois, love you.

Sombrement, elle secoua la tête.

No, you don’t love me !

— Mais si ! Mais si ! Je vous aime !

— Vous non connaît moâ.

Yes ! Connais vous. Vous poète. Vous… moi sais… moi comprendre…

Il eût pu prononcer le nom de Rodrigo, lui faire entendre, malgré les difficultés, que le Brésilien était à Londres. Elle eût deviné le reste. Il serra les dents, humilié. Trop tôt elle saurait l’admiration du rival.

Ses mains persuasives attirèrent encore. Il voulait l’avoir sur son épaule, comme à sa dernière visite. Voyant qu’elle résistait, il n’osa pas. Il avait si peur de la froisser encore ! Il se courba pour embrasser ses longues mains, toutes les deux réunies dans les siennes. Il entendit son profond soupir. Relevant la tête, il la considéra longtemps. Il ne la tenait