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rédalga

Je ne l’ai-pas abordée de front, comme tu penses. Nous avons d’abord parlé de trente-six choses. De ta fontaine, de ton nouveau buste, du parc, des environs, de Rodrigo, du chien.

— Ah !… Elle t’a parlé de Rodrigo ?… Qu’est-ce qu’elle en a dit ?

— Elle a demandé si j’avais de ses nouvelles. J’ai dit que non, puisque c’est la vérité… Ensuite nous avons…

— Elle ne t’a rien dit de particulier sur Rodrigo ?

— Mais je ne crois pas… Ah ! si. Elle m’a dit qu’elle le trouvait trop jeune pour être encore intéressant. Elle est un peu comme moi, du reste. C’est une Européenne invétérée. Elle n’aime pas les races neuves. Mais ce n’est pas ça qui nous intéresse, n’est-ce pas ? Tu voulais savoir autre chose.

Les petits yeux d’Alvaro s’amusent. Il a senti trembler la jalousie dans la voix de Jude. Il passe outre et continue.

— Voilà, en deux mots. Lady Mary (tu permets que je l’appelle comme ça ? Au Portugal, nous laissons toujours de côté les noms de famille), voudrait aller un jour à Paris avec toi pour passer à sa banque et faire quelques achats.

— Ah ! Je suis bien aise de le savoir. Nous irons demain.

— Elle voudrait aussi se procurer une méthode pour apprendre sérieusement le français.

— Quelle bonne idée ! Moi, j’apprendrai l’anglais en même temps. Comme ça, nous ferons chacun la moitié du chemin… Ensuite ?

— Ensuite, j’ai amené l’entretien sur les livres, sur des nouveautés parues à Londres, et elle veut bien accepter que je lui offre les deux ou trois volumes qui ont semblé particulièrement l’intéresser.

— Quelle chance ! Voilà qui va la distraire pendant que je pioche mon marbre ! Alvaro, tu étais né pour être diplomate. Comme je te remercie.

— Cher, c’est si peu de chose !