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rédalga

La salle de bain s’égouttait encore. « Ah ! Elle est réveillée ! »

Il frappa timidement à la porte de la chambre, qui s’ouvrit aussitôt. Prête, correcte dans son tailleur ordinaire :

Good morning !… le salua Mrs Backeray fort posément sans le laisser entrer.

Jude chercha son regard. Il croyait la trouver encore au lit.

— Chérie… murmura-t-il, en lui prenant la main.

Mais il la vit se diriger vers l’escalier sans répondre même par le plus petit signe à cette tendresse qui voulait en continuer d’autres. Il n’était pas forcé de savoir qu’une Anglaise, même si nul témoin n’est présent, ne tient pas, en face de son complice, à se souvenir, quand la lumière est revenue, de ce qui s’est passé la nuit.

Il soupira sans comprendre, et la suivit dans les marches qu’elle descendait, droite, pleine de dignité.

Quand elle fut à son tour assise à la table devant son déjeuner.

— Bien dormi ?… Sleep… Well ?…

Le langage de bébé recommençait, après ces grandes heures nocturnes durant lesquelles, enfin, ils n’avaient pas eu besoin de se parler pour s’entendre.

À sa question, elle riposta :

Very well, thank you.

Puis, son café bu, vite elle alluma sa première cigarette, se leva, fit un geste vers le parc.

La chaleur de la journée s’annonçait par cet imperceptible tremblement de l’air qu’on ne remarque que pendant le plein été. Sitôt dehors, Rédalga respira profondément, les yeux fermés, avec l’air de retrouver un parfum connu, depuis trop longtemps oublié, Son bonheur attendrissait Harlingues.

« Pauvre petite !… Elle aura toujours eu ça dans sa vie malheureuse !… »