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DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

contenté de conjecturer ? Malgré les progrès immenses de l’Astronomie, les modernes ont-ils pu assigner une preuve directe du mouvement diurne de la Terre, avant le voyage de Richer à Cayenne, et la nécessité où il se trouva de raccourcir son pendule ? Ont-ils pu trouver une démonstration positive et directe du mouvement annuel de la Terre, avant que Roëmer eût mesuré la vitesse de la lumière, et avant que Bradley eût observé et calculé les phénomènes de l’aberration ? Avant ces découvertes, avant celle de la pesanteur universelle, les plus déterminés Coperniciens n’étaient-ils pas réduits à de simples probabilités ? Ne se bornaient-ils pas à faire valoir la simplicité du système de Copernic, qu’ils comparaient à la complication absurde du système de Ptolémée ? Les anciens, à plus forte raison, et surtout lorsqu’ils n’avaient encore que des idées très confuses des mouvements des planètes, se seraient trouvés dans le même embarras que les modernes. Ils n’auraient pu donner en preuve que la simplicité de l’idée Pythagoricienne. Mais cette simplicité même, l’ont-ils soupçonnée ? En voit-on chez les anciens la plus simple mention ? Puisqu’ils n’ont fait que si peu d’attention à cette idée (qui ne se trouve que chez Cicéron et Vitruve), que le Soleil était le centre des mouvements de Mercure et de Vénus, et qu’ils n’ont pas su étendre cette notion aux autres planètes, comment se persuader qu’ils aient pu rendre toutes les orbites, et même celle de la Terre, concentriques au Soleil, pour y trouver une explication plus simple des stations et des rétrogradations ? Enfin quand j’accorderais, malgré le silence universel de tous les auteurs, et contre ma conviction intime, que les anciens ont eu ces idées, il est du moins incontestable qu’il n’en restait aucun vestige. Copernic a été obligé de les imaginer de nouveau. Son système lui appartient en propre ; ce système n’est, pour nous, ni celui de Philolaüs, ni celui d’Aristarque, dont les écrits ne nous sont point parvenus ; il est celui de Copernic, qui a mérité d’y attacher son nom, par le soin qu’il a pris d’en expliquer toutes les parties, d’en faire sortir tous les phénomènes que l’on observe, d’y trouver la cause des mouvemens de précession remarqués depuis 1800 ans, sans que jamais on eût tenté de leur assigner d’autre cause que l’existence hypothétique d’une huitième sphère, qui faisait sa révolution en 56,000 ans autour des pôles de l’écliptique, et qu’il fallait en outre faire tourner en vingt-quatre heures autour des pôles de l’équateur, pour rendre raison des mouvements diurnes.

C’est donc par Copernic que le mouvement de la Terre a été réelle-