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Je n’éprouve pas le besoin de citer des paroles du général Mordacq qui, lui aussi, a écrit des sottises analogues. Mais je veux citer le général de Castelnau. Il y a une scène édifiante qui est dépeinte tout au long dans les procès-verbaux de l’Enquête sur la métallurgie et qui s’est passée en 1911, au ministère de la Guerre.

M. Vandame, député conservateur de Lille, était rapporteur à ce moment du projet de loi déclassant Lille, projet présenté par l’Etat-major et le ministre de la Guerre. M. Vandame éprouva quelques scrupules et il demanda à être confronté, ainsi que le général Lebas, gouverneur de Lille, hostile à son déclassement, avec le général Joffre. A défaut du général Joffre, le général de Castelnau fit venir le général Lebas qui énonça ses arguments et fit valoir que l’armée allemande pourrait passer par la Belgique. De Castelnau lui répondit, après avoir bien entendu affirmé que les Allemands ne marcheraient qu’avec leur armée active :

« Général, voilà une table sur laquelle se trouvent dressés nos plans de la Belgique. Voyez la distance qui sépare ses frontières de l’est et de l’ouest. De combien de corps d’armée pensez-vous que nos ennemis puissent disposer au moment de la mobilisation ? Vingt-trois ou vingt-cinq au plus, car nous ne pouvons pas admettre que, dès le début des opérations, leurs réserves soient en ligne…

« Vous admettez que les Allemands devront laisser des corps d’occupation du côté de leur frontière orientale, car si la Russie est lente à se mobiliser, ils ne peuvent cependant pas se laisser envahir par les cosaques. Du côté de la trouée de Belfort et de l’Al-