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CORINNE OU L’ITALIE.

de se perfectionner soi-même, de se décider dans tout par le sentiment du devoir est un état doux ; et je ne puis savoir quel ravage le seul son de votre voix pourrait produire dans cette vie de repos que je crois avoir obtenue. Vous m’avez fait beaucoup de mal en me disant que votre santé était altérée. Ah ! ce n’est pas moi qui la soigne ; mais c’est encore moi qui souffre avec vous. Que Dieu bénisse vos jours, Mylord ; soyez heureux, mais soyez-le par la piété. Une communication secrète avec la divinité semble placer en nous-mêmes l’être qui se confie et la voix qui lui répond ; elle fait deux amis d’une seule ame. Chercheriez-vous encore ce qu’on appelle le bonheur ? Ah ! trouverez-vous mieux que ma tendresse ? Savez-vous que dans les déserts du nouveau monde j’aurais béni mon sort, si vous m’aviez permis de vous y suivre ? savez-vous que je vous aurais servi comme une esclave ? savez-vous que je me serais prosternée devant vous comme devant un envoyé du ciel, si vous m’aviez fidèlement aimée ? Hé bien, qu’avez-vous fait de tant d’amour ? qu’avez-vous fait de cette affection unique en ce monde ? un malheur unique comme elle. Ne prétendez donc plus au bonheur ; ne m’offensez pas en