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CORINNE OU L’ITALIE.

battre doucement l’austérité et l’exigence toujours croissante de lady Edgermond, si celle-ci ne lui avait pas persuadé qu’elle se conduisait ainsi seulement pour s’opposer au penchant de lord Nelvil pour le séjour de l’Italie. — Il faut lutter sans cesse, disait-elle, par la puissance du devoir contre le retour possible d’une inclination si funeste. — Lord Nelvil avait certainement aussi un grand respect pour le devoir, mais il le considérait sous des rapports plus étendus que lady Edgermond. Il aimait à remonter à sa source, il le croyait parfaitement en harmonie avec nos véritables penchans, et pensait qu’il n’exigeait point de nous des sacrifices et des combats continuels. Il lui semblait enfin que la vertu, loin de tourmenter la vie, contribuait tellement au bonheur durable, qu’on pouvait la considérer comme une sorte de prescience accordée à l’homme sur cette terre.

Quelquefois Oswald, en développant ses idées se livrait au plaisir d’employer des expressions de Corinne ; il s’écoutait avec plaisir quand il empruntait son langage. Lady Edgermond montrait de l’humeur dès qu’il se laissait aller à cette manière de penser et de parler : les idées nouvelles déplaisent aux personnes âgées ; elles aiment à se persuader que le