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CHAPITRE III


UN jour Corinne résolut d’aller voir à Florence les belles églises qui décorent cette ville ; elle se rappelait qu’à Rome quelques heures passées dans St.-Pierre calmaient toujours son ame, et elle espérait le même secours des temples de Florence. Pour se rendre à la ville elle traversa le bois charmant qui est sur les bords de l’Arno : c’était une soirée ravissante du mois de juin, l’air était embaumé par une inconcevable abondance de roses, et les visages de tous ceux qui se promenaient exprimaient le bonheur. Corinne sentit un redoublement de tristesse en se voyant exclue de cette félicité générale que la Providence accorde à la plupart des êtres, mais cependant elle la bénit avec douceur de faire du bien aux hommes. — Je suis une exception à l’ordre universel, se disait-elle, il y a du bonheur pour tous, et cette terrible faculté de souffrir, qui me tue, c’est une manière de sentir particulière à moi seule. Ô mon Dieu ! cependant, pourquoi m’avez-vous