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CORINNE OU L’ITALIE.

pour soigner les intérêts de Corinne ; mais lady Edgermond était si malade, et sa fille tellement inquiète de se trouver ainsi seule à Londres, sans aucun parent (M. Edgermond n’y étant pas), sans savoir seulement à quel médecin il fallait s’adresser, qu’Oswald crut de son devoir envers l’amie de son père de consacrer tout son, temps à la soigner.

Lady Edgermond, naturellement âpre et fière, semblait ne s’adoucir que pour Oswald : elle le laissait venir tous les jours chez elle, sans qu’il prononçât un seul mot qui put faire supposer l’intention d’épouser sa fille. Le nom et la beauté de Lucile en faisaient l’un des plus brillans partis de l’Angleterre ; et depuis qu’elle avait paru au spectacle, et qu’on la savait à Londres, sa porte était assiégée par les visites des plus grands seigneurs du pays. Lady Edgermond refusait constamment de recevoir personne : elle ne sortait jamais et ne recevait que lord Nelvil. Comment n’aurait-il pas été flatté d’une conduite si délicate ? Cette générosité silencieuse qui s’en remettait à lui sans rien demander, sans se plaindre de rien, le touchait vivement, et cependant chaque fois qu’il allait dans la maison de lady Edgermond, il craignait que sa présence ne fût interprétée comme un engagement. Il au-