Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome II, 1807.djvu/276

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
272
CORINNE OU L’ITALIE.

avait fait disparaître. Dès qu’il eut mis le pied sur la terre d’Angleterre, il fut frappé de l’ordre et de l’aisance, de la richesse et de l’industrie qui s’offraient à ses regards ; les penchans, les habitudes, les goûts nés avec lui se réveillèrent avec plus de force que jamais. Dans ce pays où les hommes ont tant de dignité, et les femmes tant de modestie, où le bonheur domestique est le lien du bonheur public, Oswald pensait à l’Italie pour la plaindre. Il lui semblait que dans sa patrie la raison humaine était partout noblement empreinte, tandis qu’en Italie les institutions et l’état social ne rappelaient, à beaucoup d’égards, que la confusion, la faiblesse et l’ignorance. Les tableaux séduisans, les impressions poétiques faisaient place dans son cœur au profond sentiment de la liberté et de la morale ; et, bien qu’il chérît toujours Corinne, il la blâmait doucement de s’être ennuyée de vivre dans une contrée qu’il trouvait si noble et si sage. Enfin, s’il avait passé d’un pays où l’imagination est divinisée dans un pays aride ou frivole, tous ses souvenirs, toute son ame l’auraient vivement ramené vers l’Italie ; mais il échangeait le désir indéfini d’un bonheur romanesque contre l’orgueil des vrais biens de la vie, l’indépendance et la sécurité. Il rentrait