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CORINNE OU L’ITALIE.

égarée : — Vous m’aviez promis de ne pas me quitter sans mon consentement : je puis vous paraître à présent indigne de votre affection ; mais votre promesse, pourquoi la méprisez-vous ? — Corinne, reprit Oswald, jamais l’idée de vous quitter ne s’est approchée de mon cœur ; je voulais seulement réfléchir sur notre sort, et recueillir mes esprits avant de vous revoir. — Eh bien ! dit alors Corinne en essayant de paraître calme, vous en avez eu le temps pendant ces mortelles heures qui ont failli me coûter la vie : vous en avez eu le temps ; parlez donc, et dites-moi ce que vous avez résolu. — Oswald, effrayé du son de voix de Corinne, qui trahissait son émotion intérieure, se mit à genoux devant elle, et lui dit : — Corinne, le cœur de ton ami n’est point changé ; qu’ai-je donc appris qui pût me désenchanter de toi ? Mais, écoute. — Et comme elle tremblait toujours plus fortement, il reprit avec instance : — Écoute sans terreur celui qui ne peut vivre, et te savoir malheureuse. — Ah ! s’écria Corinne, c’est, de mon bonheur que vous parlez ; il ne s’agit déjà plus du vôtre. Je ne repousse pas votre pitié ; dans ce moment, j’en ai besoin : mais pensez-vous cependant que c’est d’elle seule que je veuille vivre ? — Non ; c’est de mon amour que nous