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CORINNE OU L’ITALIE.

est d’autant plus héroïque, qu’il n’en est pour cela ni plus considéré ni plus recherché. À quelques honorables exceptions près, les hautes classes ont assez de ressemblance avec les dernières ; l’esprit des unes n’est guère plus cultivé que celui des autres, et l’usage du monde fait la seule différence à l’extérieur. Mais au milieu de cette ignorance, il y a un fond d’esprit naturel et d’aptitude à tout, tel, qu’on ne peut prévoir ce que deviendrait une semblable nation, si toute la force du gouvernement était dirigée dans le sens des lumières et de la morale. Comme il y a peu d’instruction à Naples, on y trouve, jusqu’à présent, plus d’originalité dans le caractère que dans l’esprit. Mais les hommes remarquables de ce pays, tels que l’abbé Galiani, Caraccioli, etc., possédaient, dit-on, au plus haut degré, la plaisanterie et la réflexion, rares puissances de la pensée, réunion sans laquelle la pédanterie ou la frivolité vous empêchent de connaître la véritable valeur des choses !

Le peuple napolitain, à quelques égards, n’est point du tout civilisé ; mais il n’est point vulgaire à la manière des autres peuples. Sa grossièreté même frappe l’imagination. La rive africaine qui borde la mer de l’autre côté se fait