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CORINNE OU L’ITALIE.

sante. Car il est si aisé pour le peuple de subsister matériellement à Naples, qu’il peut se passer du genre d’industrie nécessaire ailleurs pour gagner sa vie. La paresse et l’ignorance, combinées avec l’air volcanique qu’on respire dans ce séjour, doivent produire la férocité, quand les passions sont excitées, mais ce peuple n’est pas plus méchant qu’un autre. Il a de l’imagination, ce qui pourrait être le principe d’actions désintéressées, et avec cette imagination, on le conduirait au bien, si ses institutions politiques et religieuses étaient bonnes.

On voit des Calabrois qui se mettent en marche pour aller cultiver les terres, avec un joueur de violon à leur tête, et dansant de temps en temps pour se reposer de marcher. Il y a tous les ans, près de Naples, une fête consacrée à la Madonne de la grotte, dans laquelle les jeunes filles dansent au son du tambourin et des castagnettes, et il n’est pas rare qu’elles fassent mettre pour condition, dans leur contrat de mariage, que leur époux les conduira tous les ans à cette fête. On voit à Naples, sur le théâtre, un acteur âgé de quatre-vingts ans, qui depuis soixante ans fait rire les Napolitains dans leur rôle comique national, le Polichinelle. Se représente-t-on ce que sera l’immortalité de