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CORINNE OU L’ITALIE.

Voilà l’anneau que mon père avait donné à sa femme, l’anneau le plus saint, le plus sacré, qui fut offert par la bonne foi la plus noble, accepté par le cœur le plus fidèle ; je l’ôte de mon doigt pour le mettre au tien. Et dès cet instant je ne suis plus libre, tant que vous le conserverez, chère amie, je ne le suis plus. J’en prends l’engagement solennel avant de savoir qui vous êtes ; c’est votre ame que j’en crois, c’est elle qui m’a tout appris. Les événemens de votre vie, s’ils viennent de vous, doivent être nobles comme votre caractère ; s’ils viennent du sort, et que vous en ayez été la victime, je remercie le ciel d’être chargé de les réparer. Ainsi donc, ô ma Corinne, apprenez-moi vos secrets, vous le devez à celui dont les promesses ont précédé votre confiance. —

— Oswald, répondit Corinne, cette émotion si touchante naît en vous d’une erreur, et je ne puis accepter cet anneau sans la dissiper ; vous croyez que j’ai deviné par une inspiration du cœur les traits de votre père ; mais je dois vous apprendre que je l’ai vu lui-même plusieurs fois. — Vous avez vu mon père, s’écria lord Nelvil, et comment ? dans quel lieu ? se peut-il, Ô mon Dieu ! qui donc êtes-vous ? — Voilà votre anneau, dit Corinne avec une émotion