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CONSIDÉRATIONS

des massacres religieux, ou par des assassinats judiciaires. Tout à coup la Providence a permis que l’Angleterre ait résolu le problème des monarchies constitutionnelles, et l’Amérique, un siècle plus tard, celui des républiques fédératives. Depuis cette époque, ni dans l’un ni dans l’autre de ces deux pays, il ne s’est versé une goutte de sang injustement par les tribunaux ; depuis soixante ans, les querelles religieuses ont cessé en Angleterre, et il n’en a jamais existé en Amérique. Enfin, le venin du pouvoir, qui a corrompu tant d’hommes depuis tant de siècles, a subi par les gouvernemens représentatifs l’inoculation salutaire qui en détruit toute la malignité. Depuis la bataille de Culloden, en 1746, qu’on peut considérer comme la fin des troubles civils qui avoient commencé cent ans auparavant, on ne sauroit citer un abus du pouvoir en Angleterre. Il n’est pas un citoyen honnête qui n’ait dit : Notre heureuse constitution, parce qu’il n’en est pas un qui ne se soit senti protégé par elle. Cette chimère, car c’est ainsi qu’on a toujours appelé le beau, est là, réalisée sous nos yeux. Quel sentiment, quel préjugé, quel endurcissement de tête et de cœur, peut faire qu’en se rappelant ce que nous lisons dans notre