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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

seront irréparables, font frémir, comme si l’on étoit témoin de sa mort.

Les émissaires du parti catholique veulent assassiner Élizabeth à son retour à Londres. Talbot, le plus vertueux des amis de la reine, désarme l’assassin qui vouloit la poignarder, et le peuple demande à grands cris la mort de Marie. C’est une scène admirable que celle où le chancelier Burleigh presse Élizabeth de signer la sentence de Marie, tandis que Talbot, qui vient de sauver la vie de sa souveraine, se jette à ses pieds pour la conjurer de faire grâce à son ennemie.

«  On vous répète, lui dit-il, que le peuple demande sa mort, on croit vous plaire par cette feinte violence ; on croit vous déterminer à ce que vous souhaitez ; mais prononcez que vous voulez la sauver, et dans l’instant vous verrez la prétendue nécessité de sa mort s’évanouir : ce qu’on trouvoit juste passera pour injuste, et les mêmes hommes qui l’accusent prendront hautement sa défense. Vous la craignez vivante ; ah ! craignez-la surtout quand elle ne sera plus. C’est alors qu’elle sera vraiment redoutable ; elle renaîtra de son tombeau ; comme la déesse de la discorde, comme