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DE LA LITTÉRARURE ET LES ARTS

les études relatives à la pratique de l’art de celles qui ont uniquement pour objet la théorie du talent ; celles-ci, poussées trop loin, étouffent l’invention ; l’on est troublé par le souvenir de tout ce qui a été dit sur chaque chef-d’œuvre, on croit sentir entre soi et l’objet que l’on veut peindre une foule de traités sur la peinture et la sculpture, l’idéal et le réel, et l’artiste n’est plus seul avec la nature. Sans doute l’esprit de ces divers traités est toujours l’encouragement ; mais à force d’encouragement on lasse le génie, comme à force de gêne on l’éteint, et dans tout ce qui tient à l’imagination il faut une si heureuse combinaison d’obstacles et de facilités, que des siècles peuvent s’écouler sans que l’on arrive à ce point juste qui fait éclore l’esprit humain dans toute sa force.

Avant l’époque de la réformation, les Allemands avoient une école de peinture que ne dédaignoit pas l’école italienne. Albert Dürer, Lucas Cranach, Holbein, ont, dans leur manière de peindre, des rapports avec les prédécesseurs de Raphaël, Perugin, André Mantegne, etc. Holbein se rapproche davantage de Léonard de Vinci ; en général cependant il y a plus de dureté dans l’école allemande que dans celle des