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DE LA LITTÉRARURE ET LES ARTS

La religion et la guerre se mêlèrent chez les Espagnols plus que dans toute autre nation ; ce sont eux qui, par des combats continuels, repoussèrent les Maures de leur sein, et l’on pouvoit les considérer comme l’avant-garde de la chrétienté européenne ; ils conquirent leurs églises sur les Arabes, un acte de leur culte était un trophée pour leurs armes, et leur foi triomphante, quelquefois portée jusqu’au fanatisme, s’allioit avec le sentiment de l’honneur, et donnoit ; à leur caractère une imposante dignité. Cette gravité mêlée d’imagination, cette gaieté même, qui ne fait rien perdre au sérieux de toutes les affections profondes, se montre dans la littérature espagnole toute composée de fictions et de poésies, dont la religion, l’amour et les exploits guerriers sont l’objet. On eût dit que dans ces temps où le Nouveau-Monde fut découvert, les trésors d’un autre hémisphère servoient aux richesses de l’imagination aussi-bien qu’à celles de l’état, et que dans l’empire de la poésie, comme dans celui de Charles-Quint, le soleil ne cessait jaa mais d’éclairer l’horizon. »

Les auditeurs de W. Schlegel furent vivement émus par ce tableau, et la langue allemande,