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DE LA LITTÉRARURE ET LES ARTS

quefois en Allemagne encore plus de critiques que d’auteurs ; mais les analyses de Lessing, le créateur du style dans la prose allemande, sont faites de manière à pouvoir être considérées comme des ouvrages.

Kant, Goethe, J. de Müller, les plus grands écrivains de l’Allemagne en tout genre, ont inséré dans les journaux ce qu’ils appellent les recensions des divers écrits qui ont paru, et ces recensions renferment la théorie philosophique et les connoissances positives les plus approfondies. Parmi les écrivains les plus jeunes, Schiller et les deux Schlegel se sont montrés de beaucoup supérieurs à tous les autres critiques. Schiller est le premier parmi les disciples de Kant qui ait appliqué sa philosophie à la littérature ; et en effet, partir de l’âme pour juger les objets extérieurs, ou des objets extérieurs pour savoir ce qui se passe dans l’âme, c’est une marche si différente que tout doit s’en ressentir. Schiller a écrit deux traités sur le naïf et le sentimental, dans lesquels le talent qui s’ignore et le talent qui s’observe lui-même sont analysés avec une sagacité prodigieuse ; mais dans son essai sur la grâce et la dignité, et dans ses lettres sur l’Esthétique, c’est-à-dire la théorie du beau, il y a trop de métaphysique. Lorsqu’on