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DES HISTORIENS ALLEMANDS

doit sa puissance sur l’imagination ; les mots anciens dont il se sert si à propos ont un air de loyauté germanique qui inspire de la confiance. Néanmoins il a tort de vouloir quelquefois mêler la concision de Tacite à la naïveté du moyen âge : ces deux imitations se contredisent. Il n’y a même que Müller à qui les tournures du vieux allemand réussissent quelquefois ; pour tout autre ce seroit de l’affectation. Salluste seul, parmi les écrivains de l’antiquité, a imaginé d’employer les formes et les termes d’un temps antérieur au sien ; en général le naturel s’oppose à cette sorte d’imitation ; cependant les chroniques du moyen âge étoient si familières à Müller, que c’est spontanément qu’il écrit souvent du même style. Il faut bien que ses expressions soient vraies, puisqu’elles inspirent ce qu’il veut faire éprouver.

On est bien aise de croire, en lisant Müller, que parmi toutes les vertus qu’il a si bien senties il en est qu’il a possédées. Son testament qu’on vient de publier est au moins une preuve de son désintéressement. Il ne laisse point de fortune, et il demande que l’on vende ses manuscrits pour payer ses dettes. Il ajoute que si cela suffit pour les acquitter, il se permet de disposer de sa montre en faveur de son domestique. « Ce n’est