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DE LA LITTÉRARURE ET LES ARTS

préliminaires sont des chefs-d’œuvre d’éloquence. Nul n’a su mieux que Müller montrer dans ses écrits le patriotisme le plus énergique ; et maintenant qu’il n’est plus, c’est par ses écrits seuls qu’il faut l’apprécier.

Il décrit en peintre la contrée où se sont passés les principaux événements de la confédération helvétique. On auroit tort de se faire l’historien d’un pays qu’on n’auroit pas vu soi-nlême. Les sites, les lieux, la nature sont comme le fond du tableau, et les faits, quelque bien racontés qu’ils puissent être, n’ont pas tous les caractères de la vérité quand on ne vous fait pas voir les objets extérieurs dont les hommes étoient environnés.

L’érudition qui a induit Müller à mettre trop d’importance à chaque fait lui est bien utile quand il s’agit d’un événement vraiment digne d’être animé par l’imagination. Il le raconte alors comme s’il s’étoit passé la veille, et sait lui donner l’intérêt qu’une circonstance encore présente feroit éprouver. Il faut, autant qu’on le peut, dans l’histoire comme dans les fictions, laisser au lecteur le plaisir et l’occasion de pressen tir lui-même les caractères et la marche des événements. Il se lasse facilement de ce qu’on lui dit, mais il est ravi de ce qu’il découvre ; et l’on assimile la litté-