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DE LA LITTÉRARURE ET LES ARTS

de vue, la plaisanterie et le sérieux ; car il mêle constamment l’une à l’autre. Sa manière d’observer le cœur humain est pleine de finesse et de gaieté, mais il ne connoît guère que le cœur humain tel qu’on peut le juger d’après les petites villes d’Allemagne, et il y a souvent dans la peinture de ces mœurs quelque chose de trop innocent pour notre siècle. Des observations si délicates et presque si minutieuses sur les affections morales rappellent un peu ce personnage des contes des Fées, surnommé Fine Oreille, parce qu’il entendoit les plantes pousser. Sterne a bien à cet égard quelque analogie avec J. Paul ; mais si J. Paul lui est très-supérieur dans la partie sérieuse et poétique de ses ouvrages, Sterne à plus de goût et d’élégance dans la plaisanterie, et l’on voit qu’il a vécu dans une société dont les rapports étoient plus étendus et plus brillants.

Ce seroit un ouvrage bien remarquable néanmoins que des pensées extraites des ouvrages de J. Paul ; mais on s’aperçoit, en le lisant, de l’habitude singulière qu’il a de recueillir partout, dans des vieux livres inconnus, dans des ouvrages de sciences, etc., des métaphores et des allusions. Les rapprochements qu’il en tire sont presque toujours très-ingénieux : mais quand il faut de