Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 2, 1814.djvu/297

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
279
De la déclamation.

comique, des marquis, des fats, etc. Ce qui fait la grâce de ce genre de rôle, c’est ce que les Italiens appellent la disinvoltura, et ce qui se traduiroit en français par l’air dégagé. L’habitude qu’ont les Allemands de mettre à tout de l’importance est précisément ce qui s’oppose le plus à cette facile légèreté. Mais il est impossible de porter plus loin l’originalité, la verve comique et l’art de peindre les caractères, que ne le fait Iffland dans ses rôles. Je ne crois pas que nous ayons jamais vu au théâtre français un talent plus varié ni plus inattendu que le sien, ni un acteur qui se risque à rendre les défauts et les ridicules naturels avec une expression aussi frappante. Il y a dans la comédie des modèles donnés, les pères avares, les fils libertins, les valets fripons, les tuteurs dupés ; mais les rôles d’Iffland, tels qu’il les conçoit, ne peuvent entrer dans aucun de ces moules : il faut les nommer tous par leur nom ; car ce sont des individus qui diffèrent singulièrement l’un de l’autre, et dans lesquels Iffland paroît vivre comme chez lui.

Sa manière de jouer la tragédie est aussi, selon moi, d’un grand effet. Le calme et la simplicité de sa déclamation dans le beau rôle de Walstein ne peuvent s’effacer du souvenir. L’impression