Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 2, 1814.djvu/263

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
245
PIÈCES DU THÉATRE ALLEMAND

chef des Péruviens, a long-temps combattu contre les Espagnols ; il aimoit Cora, la fille du Soleil, et néanmoins il a généreusement travaillé à vaincre les obstacles qui la séparoient d’Alonzo. Un an après leur hymen les Espagnols enlèvent le fils de Cora qui venoit de naître ; Rolla s’expose à tous les périls pour le retrouver, il le rapporte enfin couvert de sang dans son berceau ; Rolla voit la terreur de la mère à cet aspect. « Rassure-toi, lui dit-il, ce sang-là, c’est le mien ! » et il expire.

Quelques écrivains allemands n’ont pas été justes, ce me semble, envers le talent dramatique de Kotzebue ; mais il faut reconnoître les motifs estimables de cette prévention ; Kotzebue n’a pas toujours respecté dans ses pièces la vertu sévère et la religion positive ; il s’est permis un tel tort, non par système, ce me semble, mais pour produire, selon l’occasion, plus d’effet au théâtre : il n’en est pas moins vrai que des critiques austères ont dû l’en blâmer. Il paroît lui-même depuis quelques années se conformer à des principes plus réguliers, et loin que son talent y perde, il y a beaucoup gagné. La hauteur et la fermeté de la pensée tiennent toujours par des liens secrets à la pureté de la morale.