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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

cruellement punis, on ne sent pas dans cette punition une main bienfaisante ; on diroit que le mauvais principe dirige lui-même la vengeance contre le crime qu’il fait commettre ; et le remords, tel qu’il est peint dans cette pièce, semble venir de l’enfer aussi-bien que la faute.

La croyance aux mauvais esprits se retrouve dans un grand nombre de poésies allemandes ; la nature du Nord s’accorde assez bien avec cette terreur ; il est donc beaucoup moins ridicule en Allemagne, que cela ne le seroit en France, de se servir du diable dans les fictions. À ne considérer toutes ces idées que sous le rapport littéraire, il est certain que notre imagination se figure quelque chose qui répond à l’idée d’un mauvais génie, soit dans le cœur humain, soit dans la nature : l’homme fait quelquefois du mal d’une manière pour ainsi dire désintéressée, sans but et même contre son hut, et seulement pour satisfaire une certaine âpreté intérieure qui donne le besoin de nuire. Il y avoit à côté des divinités du paganisme d’autres divinités de la race des Titans, qui représentoient les forces révoltées de la nature ; et dans le christianisme on diroit que les mauvais pen-