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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

Le comte d’Egmont aime une jeune fille, Clara, née dans la classe des bourgeois de Bruxelles ; il va la voir dans son obscure retraite. Cet amour tient plus de place dans le cœur de la jeune fille que dans le sien ; l’imagination de Clara est toute entière subjuguée par l’éclat du comte d’Egmont, par le prestige éblouissant de son héroïque valeur et de sa brillante renommée. Egmont a dans son amour de la bonté et de la douceur, il se repose auprès de cette jeune personne des inquiétudes et des affaires. — « On te parle, lui dit-il, de cet Egmont, silencieux, sévère, imposant ; c’est lui qui doit lutter avec les événements et les hommes ; mais celui qui est simple, aimant, confiant, heureux, cet Egmont-là, Clara, c’est le tien. » L’amour d’Egmont pour Clara ne suffiroit pas à l’intérêt de la pièce ; mais quand le malheur vient s’y mêler, ce sentiment qui ne paroissoit que dans le lointain acquiert une admirable force.

On apprend l’arrivée des Espagnols ayant le duc d’Albe à leur tête ; la terreur que répand ce peuple sévère, au milieu de la nation joyeuse de Bruxelles, est supérieurement décrite. À l’approche d’un grand orage les hommes rentrent dans leur maison, les animaux tremblent,