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du Païs de Liége.

conſerver la neutralité entre les deux Puiſſances, qui ſe faiſoient la guerre, qui vient d’être terminée par une paix également glorieuſe à l’Empire & à la France.

Populaire ſans baſſeſſe, & réſervé ſans fierté, il n’a jamais formé de projet concernant le bien public qu’il ne l’ait communiqué à ſes ſujets : & comme la ſageſſe eſt le niveau de ſes idées, il a eu la douce ſatiſfaction de les voir aplaudir à ſes deſſeins, loüer ſes actions, & ſe ſoumettre à ſes ordres, avec autant de promptitude que de cordialité. C’eſt par des endroits ſi eſſentiels, qu’ils lui donnent des marques ſincéres de la plus reſpectueuſe reconnoiſſance. Tel eſt le gouvernement de ce Prince ; telle eſt la confiance de ſes Sujets. C’est ainſi que la ſageſſe des enfans établit ſolidement la gloire de leur Pere.

Les habitans de Liége étoient, depuis plus d’un ſiécle, en poſſeſſion d’un bien, pour la conſervation duquel les premiers troubles furent excités. Une pareille poſſeſſion eſt ſans contredit le plus autentique de tous les tîtres. Il faut donc convenir, qu’en mil deux cent cinquante-trois ils étoient auſſi libres qu’ils l’avoient été dès la fondation de leur Ville. On doit enſuite examiner quelle étoit leur ſituation, lorſqu’ils crurent qu’il étoit tems de ſécoüer le joug d’une domination qui les réduiſoit à l’eſclavage.

Ce n’étoit point le Prince, à proprement parler, qui les gouvernoit, c’étoit plûtôt ſes Oficiers, qui etoient des Juges que Hubert avoit établi ſous le nom d’Échevins. On ne recevoit dans ce Corps que les Deſcendans de ſes anciens Membres : & comme depuis ſon établiſſement il avoit toûjours adminiſtré ſouverainement la juſtice & la police, il avoit inſenſiblement uſurpé l’autorité abſoluë. Il formoit à la vérité tous les ans une eſpéce de Conſeil, qu’il rempliſſoit de Sujets choisis parmi le Peuple, auxquels il prépoſoit deux de ſes Membres, qui prenoient le tître de Maîtres de la Cité ; & ce Conſeil avoit l’adminiſtration de la police ; mais il n’étoit qu’un vain Phantôme, qui ne ſervoit qu’à voiler l’autorité des Oficiers du Prince. Les Conſeillers qu’on pré-