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S’amours contraint mon cuer qu’en vous se mette
Pour vous servir sanz que ja s’en desmette,
N’en ayés yre,
Pour tant se ne vous vail, flour nouvelette,
Rose de may, belle, sade et simplette,
A qui serf suis, lige, obligié de debte
Ou je me mire.

Mais s’il avient que vo valour s’orgueille
Contre mon bien, pour ce que pas pareille
N’estes a moy et que ne m’appareille
A vo haultece,

Je suis perdus se fierté vous conseille
Que m’occiez, dangier qui tousjours veille
Me courra sus, si seroit bien merveille
Qu’en tel asprece
Vesquisse, helas ! ma dame et ma maistresse,
Mon seul désir, mon espoir, ma déesse ;
Pour Dieu mercy que ne muire a destresce,
Dame, ainçois vueille

Vostre doulceur tost me mettre en adresse
De reconfort quant voyez que ne cesse
De vous servir de fait et de promesse
Quoy que m’en deuille.

Hé ! trés plaisant et amoureux viaire,
Doulx corselet, de beauté l’exemplaire,
Que vraye amour me fait amer et plaire
Sur toute chose,
Le mal que J’ay je ne vous puis plus taire,
Car vo secours m’est si trés neccessaire
Que, se ne l’ay, a la mort me fault traire,
Ne ne repose.
Si en ayez pitié, fresche com rose.
Voyez comment tout de plour je m’arrose,
Et toute foiz a peine dire l’ose