Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/315

Cette page n’a pas encore été corrigée

animosité suspecte ; la rumeur publique l’accusa d’avoir employé une ruse abominable pour écarter une favorite dont il était jaloux. Fioralise nia sa faute, mais les Toscanes savent si bien colorer le mensonge qu’à Florence on se méfie même du cri de l’innocence. La comtesse ne voulut pas de procès ; elle chassa seulement la demoiselle de compagnie et Fioralise, déshonorés, peut-être injustement, offrit ses chagrins à Dieu. Elle s’est retirée dans un couvent où elle prendra le voile après son année de noviciat.

Andronic continue à dompter des veaux sauvages dans la Pianura et sa belle-mère espère toujours qu’un de ces matins on le rapportera sur un brancard à la maison. Quant à Matteo, son père l’a envoyé à Rome, chez des protecteurs puissants. Il est secrétaire du cardinal A…, qui lui donne quatre-vingt dix écus romains d’appointements, c’est-à-dire près de cinq cents francs de France par an ; et, depuis qu’il est dans les honneurs et les richesses, il oublie et méprise ses anciens amis.

Après avoir obtenu, non sans peine, que le narrateur achevât son récit, nous prêtâmes des oreilles complaisantes à ses belles dissertations sur les enfants de l’antique Etrurie et sur l’admiration qu’on leur doit, au mépris du reste de l’Italie et du monde entier ; toutes choses aussi incontestables qu’amusantes, mais dont le lecteur ne se soucie pas et dont on peut lui faire grâce.