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MÉMOIRES.

conversation, celle qui avait fait, pendant plus de cinquante ans, les délices des sociétés, mourait sur la terre étrangère, où un vain espoir de guérison l’avait conduite ! Peu de femmes ont été douées de qualités plus aimables que madame Selby. Belle, bonne, spirituelle et charitable, sa mort a laissé un grand vide dans la société.

Je citerai, avant de me séparer d’elle, une petite anecdote de son enfance.

Nous étions un jour réunis en famille ; père, mère, oncles et tantes reprochaient à mon petit frère sa paresse à l’école, ce qui le fit pleurer. Marguerite Baby, alors âgée de six ans, s’approchant de lui pour le consoler, lui dit tout bas, mais assez haut pour être entendue :

Ne pleure pas, mon cousin, quand tu seras grand, tu n’auras pas de peine à être aussi fin qu’eux.

Sa mère voulait la punir de cette saillie peu respectueuse, malgré les éclats de rire de tous les autres membres de la famille, lorsque ma mère prit sa petite nièce dans ses bras pour la protéger, et s’écria :

Non ! non ! Adé ! (Adélaïde) tu ne lui feras pas de mal : c’est, vois-tu, trop fin pour un enfant de son âge de s’être aperçu que nous n’avions qu’une portion d’esprit assez ordinaire.

Ma tante Baby, que cette épigramme ne pouvait atteindre, aurait dû, suivant moi, tout en réprimandant un peu la petite espiègle, finir par en rire comme ma mère.

Si je ne craignais de blesser la modestie de madame de Montenach, fille de feu madame la baronne de Longueuil, je dirais qu’une jeune demoiselle de l’âge de