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OCTOBRE 1765

imprécations, des oracles qui sont des blasphèmes. Le successeur du prince des apôtres a répandu l’anathème dans l’univers.

La conduite de nos ministres nous fait regretter le paganisme, autant au-dessus du fanatisme qu’il peut être au-dessous de la doctrine chrétienne. Le corps du clergé national, oubliant son plus beau titre, qui est d’être Français, se livre à un esclavage systématique et ultramontain, dans l’intention de censurer des privilèges odieux qui ne sauraient subsister avec la liberté gallicane… Si-nous le suivons dans son enseignement, nous ne serons bientôt plus Français… Hommes, mais fanatiques romains, oubliant leur divin législateur qui dit que son empire n’est pas de ce monde, et qui leur promet de les faire régner dans une autre vie avec lui, ils répondent : « Nous sommes les maîtres du monde, nous aimons mieux dominer ici-bas, que de régner avec vous dans le ciel… Que les rois de la terre, s’il en est encore, n’existent que par une soumission aveugle au Jupiter du Capitole. »

Ce corps antique, respectable, dont l’origine se perd dans la nuit de l’origine de la nation française, ce corps indivisible de la constitution salique, essentiellement chargé du dépôt de la loi, du contrat entre le peuple et le souverain, ce corps, l’espoir unique de la nation, doit, par toutes sortes de moyens, rappeler sous le joug de la loi toute personnelle qui oserait l’enfreindre ; il est même des cas où il n’y a nulle exception à faire : tout infracteur de la loi est traître à l’État.

Tels sont vos titres et vos droits, c’est sur vous seuls que la nation tourne ses regards désolés, elle n’attend de secours que de vous.