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MÉMOIRES SECRETS

lequel M. Dorat a mis nos jeunes auteurs. Dans cette pièce, qui ne représente aucune situation neuve, on trouve ce beau vers :


Je n’avais plus d’amante, il me fallut un Dieu.

26. — On a enfin engagé mademoiselle Clairon à souscrire aux volontés de la reine, et Fréron n’ira point au Fort-l’Évêque.

27. — Les Comédiens Italiens ont donné aujourd’hui la première représentation de Tom Jones, comédie en trois actes et en prose, mêlée d’ariettes ; musique du sieur Philidor, paroles du sieur Poinsinet. Ce sujet, plus susceptible dé pathétique que des bouffonneries de ce théâtre, est absolument raté. L’auteur a semé cette pièce de toutes sortes de plaisanteries grossières et sans aucun sel. Les deux premiers actes ont ennuyé. Le parterre s’est mis en belle humeur au troisième acte, et a renouvelé la scène du troisième acte du Jeune Homme, joué aux Français l’été dernier[1]. À chaque phrase c’étaient des huées, des éclats de rire, des claquemens de mains, qui ont prolongé de beaucoup le spectacle et qui l’auraient absolument fait finir, si la pièce eût été plus longue. Philidor prétend que cette musique est sa meilleure. Elle est tellement noyée dans l’amas de mauvaises choses dont l’auteur l’a surchargée, qu’elle n’a trouvé aucune grâce. Quelque indulgent qu’on soit à ce spectacle, il n’est guère possible qu’on donne deux fois une pareille pièce.

Le sieur Poinsinet, très-confiant, avait dit plaisamment qu’il allait faire lever le Siège de Calais, voulant faire entendre que la foule se tournerait vers lui.

  1. V. 18 mai 1764. — R.