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AVRIL 1764

20. — On a fait sur madame de Pompadour une épitaphe bien différente de la première ; elle est simple, et contient l’historique de sa vie.


QuCi-gît qui fut vingt ans pucelle,
Quinze ans catin, et sept ans maquerelle.


Elle a été mariée à vingt ans, et est morte dans la quarante-troisième année de son âge.

21. — On a entendu la semaine dernière, au concert spirituel, un Cor de Chasse qui étonne tout Paris : c’est le sieur Rodolphe, de la musique du duc de Wurtemberg. Jamais cet instrument n’avait été poussé à un point si accompli : il imite tour à tour la flûte la plus douce, la trompette la plus éclatante. Ses coups de langue sont d’une rapidité, d’une variété, d’une précision incompréhensible. Il paraît exécuter avec hardiesse la musique la plus difficile et la plus rapide.

22. — Aujourd’hui, jour de Pâques, s’est passé à Versailles une scène dont le concours des circonstances fait une singularité piquante. La manie du jour est de faire tout à la grecque. L’abbé Torné, chanoine d’Orléans, qui a prêché tout le carême devant le roi, ayant oublié de faire le signe de la croix, Sa Majesté s’est retournée du côté du duc d’Ayen, son capitaine des gardes, et lui en a témoigné sa surprise : « Vous verrez, Sire, répond le plaisant, que c’est un sermon à la grecque. » L’orateur en effet commence, « Les Grecs et les Romains, etc. » Le roi ne peut retenir son envie de rire, et le prédicateur déconcerté s’est ressenti pendant tout son discours de cette plaisanterie.

23. — Le cri est général contre la nouvelle édition de Corneille par M. de Voltaire. Il paraît s’être attaché