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MÉMOIRES SECRETS

sieurs, à l’honneur que vous me faites de venir ici ; mais je ne crois pas que vous vous y amusiez beaucoup : je suis toute la journée avec madame Pater, et la nuit je couche avec elle. »

15. — La réception de l’abbé de Voisenon est renvoyée à samedi : il se tue de dire à tout le monde que son discours est plat ; il serait fâché qu’on le crût.

— On a repris aujourd’hui le Milicien : on attribue cette pièce à M. Bertin dont Ânseaume est le prête-nom. En général, c’est une forte satire des militaires ; il y a plus de vérité que de finesse.

16. — Il court dans le monde une épigramme sur Fréron, qu’on dit être de M. de Voltaire ; elle est tapée, mais mal digérée : on en jugera.


Un jour loin du sacré vallon
Un serpent mordit Jean Fréron.
Savez-vous ce qu’il arriva ?
Ce fut le serpent qui creva.

Cette épigramme, originairement en grec, ensuite traduite en latin, enfin mise en français, se trouve dans le Dictionnaire de La Martinière[1].

17. — Après une longue attente, on a joué aujourd’hui à la Comédie Française Dupuis et Desronais, comédie en trois actes, en vers libres, de M. Collé.

Dupuis est un vieux libertin, qui a une fille dont est amoureux. Desronais ; celle-ci répond à sa passion : tous

  1. Voici la version de Bruzen de La Martinière ;

    Un gros serpent mordit Aurèle :
    Que croyez-vous qu’il arriva ?
    — Qu’Aurèle en mourut. — Bagatelle !
    Ce fut le serpent qui creva.

    L’épigramme grecque est de Demodocus : Grotius l’a traduite en latin. — R.