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— Elle vivra près de nous, toujours, Madame et si je meurs dans quelques justes combats, eh bien, elle aidera Lise à élever un autre petit soldat tout dévoué à notre patrie canadienne.

— Mais Perrine demeurera encore sans un bonheur vraiment personnel. Ne peut-elle donc être aimée, cette enfant ? Oh ! je sais, on se marie jeune en ce pays, et les vingt-neuf ans de Perrine semblent peser d’un poids lourd sur sa tête blonde. Mais, Charlot, n’exagérons rien, ce n’est pas encore être très vieille que d’atteindre trente ans.

— Je le sais, certes. Et s’il y a à faire une remarque sur l’apparence de ma sœur, c’est qu’elle est encore embellie, et que la profondeur de son regard décèle une intelligence peu commune.

— Eh bien, écoute Charlot, il faut me promettre de ne plus aimer Perrine pour toi, pour les tiens, à la façon d’une ombre bienfaisante planant sur ta vie, et même au delà. Au contraire, tu feras passer le souci de son avenir, d’une vocation encore possible, avant toute chose. Ne la laisse pas se sacrifier de nouveau, le cas échéant. N’écoute pas les scrupules de son cœur. Elle a si bien éloigné de sa pensée toute part d’espérances personnelles qu’elle a fini par croire qu’elle léserait les autres si elle s’y abandonnait. Je crois que tu me comprends, mon enfant ? Tu es entier, fougueux, volontaire, mais ton cœur est noble, je le sais, Charlot.

— Je n’oublierai certes jamais, madame, ces aperçus profonds sur la nature de ma Perrine…