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On eût dit des amis de vingt ans. Le Fénat, devenu sentimental avec les vins de dessert, parlait de Castelet, de Divonne et aussi de son petit Jean ; il était heureux de le savoir avec elle, une femme sérieuse qui l’empêcherait de faire des sottises. Et sur le caractère un peu ombrageux du jeune homme, la façon de le prendre, il lui donnait des conseils comme à une jeune mariée en lui tapotant les bras, la langue épaisse, l’œil éteint et mouillé.

Il se dégrisa chez Bouchereau. Deux heures d’attente au premier étage de la place Vendôme, dans ses grands salons, hauts et froids, encombrés d’une foule silencieuse et angoissée ; l’enfer de la douleur dont ils traversèrent successivement tous les cercles, passant de pièce en pièce jusqu’au cabinet de l’illustre savant.

Bouchereau, avec sa mémoire prodigieuse, se souvint très bien de Mme Gaussin, étant venu en consultation à Castelet dix ans auparavant au commencement de la maladie ; il s’en fit raconter les différentes phases, relut les ordonnances anciennes et, tout de suite, rassura les deux hommes sur les accidents