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LETTRES DE MON MOULIN.

remerciaient d’un sourire ; et dans ces sourires fanés qui se penchaient vers moi, cherchant jusqu’au fond de mes yeux l’image de leur Maurice, moi, j’étais tout ému de la retrouver cette image, vague, voilée, presque insaisissable, comme si je voyais mon ami me sourire, très loin, dans un brouillard.




Tout à coup le vieux se dresse sur son fauteuil :

— Mais j’y pense, Mamette…, il n’a peut-être pas déjeuné !

Et Mamette, effarée, les bras au ciel :

— Pas déjeuné !… Grand Dieu !

Je croyais qu’il s’agissait encore de Maurice, et j’allais répondre que ce brave enfant n’attendait jamais plus tard que midi pour se mettre à table. Mais non, c’était bien de moi qu’on parlait ; et il faut voir quel branle-bas quand j’avouai que j’étais encore à jeun :