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LE CURÉ DE CUCUGNAN.

— Vous sentez bien, mes frères, reprit le bon abbé Martin, vous sentez bien que ceci ne peut pas durer. J’ai charge d’âmes, et je veux, je veux vous sauver de l’abîme où vous êtes tous en train de rouler tête première. Demain je me mets à l’ouvrage, pas plus tard que demain. Et l’ouvrage ne manquera pas ! Voici comment je m’y prendrai. Pour que tout se fasse bien, il faut tout faire avec ordre. Nous irons rang par rang, comme à Jonquières quand on danse.

« Demain lundi, je confesserai les vieux et les vieilles. Ce n’est rien.

« Mardi, les enfants. J’aurai bientôt fait.

« Mercredi, les garçons et les filles. Cela pourra être long.

« Jeudi, les hommes. Nous couperons court.

« Vendredi, les femmes. Je dirai : Pas d’histoires !

« Samedi, le meunier !… Ce n’est pas trop d’un jour pour lui tout seul.

« Et, si dimanche nous avons fini, nous serons bien heureux.