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blanc des hautes fenêtres, Risler a quitté sa belle redingote qui le gêne, retroussé ses manchettes toutes fraîches ; mais l’idée que sa femme attend du monde le préoccupe, l’inquiète, et de temps en temps il se remet en tenue pour monter chez lui.

– Personne n’est venu ? demande-t-il timidement.

– Non, monsieur, personne.

Dans le beau salon rouge, – car ils ont un salon en damas rouge, avec une console entre les fenêtres et une jolie table au milieu du tapis à fleurs claires, – Sidonie s’est installée en femme qui reçoit, un cercle de fauteuils et de chaises autour d’elle. Çà et là des livres, des revues, une petite corbeille à ouvrage en forme de bourriche, tressée avec des glands de soie, un bouquet de violettes dans un verre de cristal et des plantes vertes dans les jardinières. Tout cela est disposé exactement comme chez les Fromont, à l’étage au-dessous ; seulement le goût, cette ligne invisible qui sépare le distingué du vulgaire, n’est pas encore affiné. On dirait la copie médiocre d’un joli tableau de genre. La maîtresse de maison elle-même a une robe trop neuve, elle a plutôt l’air d’être en visite que chez elle. Aux yeux de Risler tout est superbe, sans reproche ; il s’apprête à le dire en entrant dans le salon, mais devant le regard courroucé de sa femme, le pauvre mari s’arrête intimidé.

– Vous voyez, il est quatre heures, lui dit-elle en montrant la pendule d’un geste de colère… Personne ne viendra… Mais c’est à Claire surtout que j’en veux de