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cette mauvaise action ? Pourquoi voulait-elle se détruire ? Voyons, répondez, nommée Delobelle, pourquoi ?

Mais la nommée Delobelle s’entêtait à ne pas répondre. Il lui semblait que ce serait souiller son amour de l’avouer dans un pareil endroit. « Je ne sais pas… Je ne sais pas… » disait-elle tout bas en frissonnant.

Dépité, impatienté, M. le commissaire déclara qu’on allait la ramener chez ses parents, mais à une condition : c’est qu’elle promettrait de ne plus jamais recommencer.

– Voyons, me le promettez-vous ?…

– Oh ! oui, monsieur…

– Vous ne recommencerez plus jamais ?…

– Non ! bien sûr, plus jamais… plus jamais…

Malgré ses protestations M. le commissaire de police hochait la tête, comme s’il ne croyait pas à ce serment.

La voilà dehors, en route pour la maison, pour le refuge : mais son martyre n’était pas encore fini. Dans la voiture, l’homme de police qui l’accompagnait se montrait trop poli, trop aimable. Elle avait l’air de ne pas comprendre, s’éloignait, retirait sa main. Quel supplice !… Le plus terrible, ce fut l’arrivée rue de Braque, la maison en émoi, la curiosité des voisins qu’il fallut subir. Depuis le matin, en effet, tout le quartier était informé de sa disparition. Le bruit courait qu’elle était partie avec Frantz Risler. De bonne heure on avait vu sortir l’illustre Delobelle, tout effaré, son chapeau de travers, les manchettes fripées, ce qui était l’indice d’une préoccupation