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VIII - LA BRASSERIE DE LA RUE BLONDEL


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Depuis son mariage, Risler avait renoncé à la brasserie. Sidonie aurait eu plaisir à le voir quitter la maison, le soir, pour un cercle élégant, une réunion d’hommes riches et bien mis ; mais l’idée qu’il retournerait dans la fumée des pipes, vers les amis du temps passé, Sigismond, Delobelle, son père, cette idée l’humiliait, la rendait malheureuse. Alors il n’y alla plus ; et cela lui coûtait un peu. C’était presque un souvenir du pays, cette brasserie située dans un coin oublié du vieux Paris. Les voitures rares, des rez-de-chaussée à hautes fenêtres grillagées, des odeurs fraîches de droguerie, de produits pharmaceutiques donnaient à cette petite rue Blondel une vague ressemblance avec certaines rues de Bâle ou de Zurich. La brasserie était tenue par un Suisse, bourrée de gens de là-bas. Quand la porte s’ouvrait, à travers le brouillard des pipes, la lourdeur