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IV.

§ 21. Nous avons vu dans les paragraphes précédents la valeur abstraite que notre couple possède aux yeux des Parses ; nous avons vu aussi que ce n’est point là leur valeur primitive ; car elle dérive de leurs attributs matériels qui ne sont pas primitifs : ils ne sont les dieux de l’Abondance que parce qu’ils sont les dieux des productions naturelles, et leurs noms sont irréductibles à cette dernière notion, puisque ces noms signifient Santé et Non-mourir. La conclusion qui s’impose est la suivante : Haurvatâif et Ameretâ^, avant d’être les dieux des eaux et des plantes, étaient les dieux de la Santé et du Non-mourir, les dieux qui préservent l’homme de la maladie et de la mort.

§ 22. Dans le chapitre précédent nous avons constaté que les objets matériels auxquels ils président, eaux et plantes, étaient dans l’Avesta en union étroite : nous devons constater à présent le même fait pour leurs objets abstraits. Tandis que le sens premier de Haurvatâ^-Ameretâ^ s’effaçait et s’oubliait, les choses mêmes que leur nom représentait restaient toujours liées dans l’esprit des Iraniens, et l’idée qu’avait exprimée ce dvandva , incompris depuis, ils continuaient à l’exprimer dans une série de dvandvas, qui restaient compris, parce que les termes composants ne se cristallisaient pas en noms de divinités, parce qu’ils gardaient leur valeur étymologique, parce qu’ils restaient des mots de la langue courante, au lieu de devenir des personnes. Signalons particulièrement deux de ces dvandvas, l’un direct, l’autre inverse.

Dvandva direct :

Tanvo-drvatai ; — daregogîti ustânahê. Le premier terme ianvo-d ?’vatâi signifie littéralement solidité du corps, ce qui n’est qu’une périphrase pour rendre l’idée de santé, idée que le pehlvi et le persan rendent par une périphrase de même sens, composée des mêmes éléments : tan duruçtî ’. Le second terme

1. Tan est le zend tanu ; duruçtî est l’abstrait de duruçt vigoureux, solide : duruçt s’explique par une forme théorique *drvaç-ta, formée par l’addition du suffixe ta à un neutre drvanh (état de ce qui est solide), lequel est au neutre védique dhruvas (même sens) dans le même rap-