Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aſſidu. Le ſpectacle eſt donc l’amuſement qui leur convient le mieux : mais pour juger de ſon utilité la plus eſſentielle, conſultons M. la Politique des Céſars : elle ſert tous les jours à éclairer la nôtre. Ils donnoient ſouvent de grands ſpectacles au Peuple parce qu’il étoient perſuadés que ce genre d’amuſement étoit propre à diſtraire les gens turbulens & factieux, ceux-ci n’aiant que peu ou point d’occupation, n’auroient emploié leur loiſir qu’à former des complots dangereux. C’eſt une bonne choſe dont on pourroit, j’en conviens, reprocher aux Céſars qu’ils abuſoient ; mais dans des États bien conſtitués il ſera toujours ſage d’emploier un moien propre à rendre les factions pour auſſi dire impoſſibles, puiſqu’il détourne les oiſifs des Aſſemblées ſecrettes, & dangereuſes.

Ce moien eſt très propre à maintenir la tranquillité d’une conſtitution établie dejà, puiſqu’il établiſſoit cette tranquillité dans un nouveau Gouvernement qui ſe formoit & dont la nouveauté étoit ſi accablante pour la principale Nobleſſe de Rome. Il n’y aura ſans doute gueres de Miniſtres au monde qui n’admirent en cela la Politique des deux premiers Céſars, & qui ne penſent qu’il eſt très utile de l’imiter, ſoit dans les Monarchies, ſoit dans les Républiques.

Il ſeroit donc très ſage & très utile de multiplier les ſpectacles & les entretenir aux dépens même de l’État pour occuper & diſtraire une quantité de gens oiſifs & libertins qui