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étant bien conduit par ſon Chéf ; au lieu que dans une République chaque Citoien ayant part un Gouvernement, il doit non ſeulement ſavoir obéir aux loix, mais même il doit être en état d’en créer & d’en propoſer de nouvelles, pour la réforme des abus qu’il apperçoit.

Un Républicain doit unir à la docilité d’un ſujet des loix, les qualités d’un grand Monarque, l’amour de la Patrie, l’intégrité, la vigilance, la modération, la ſcience militaire & politique ; il doit ſavoir, juger les Chefs qu’il doit préférer pour le bien de la République ſur des principes qui concourent à l’affermiſſement & à l’illuſtration de l’État dont il eſt membre, & au Gouvernement duquel il ſera peut-être un jour appelle. Je ne voiois dans ce raiſonnement que l’orgueil & le préjugé Républicain. Je vous le paſſois comme un vice de terroir, j’accordois au Génevois, ce que je nie au Philoſophe.

Quelqu’habile que ſoit un Monarque il ne peut gouverner tout ſeul, il lui faut un Conſeil, dont tous les membres doivent avoir les qualités patriotiques que vous ne jugez néceſſaires qu’aux Républicains : tout Monarque qui n’aura que des eſclaves ou des flateurs au lieu de Citoiens pour Conſeillers, qui n’aura que des femmes de l’un & l’autre ſexe à gouverner ſera aſſurément le plus petit des Rois. Il n’eſt donc pas indifférent pour lui d’avoir des hommes, & de grands hommes dans ſon État. Les Sulli, les Colbert, les