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ſoin de les diſtraire & de les empêcher de prêter trop attentivement l’oreille à de pareils précepteurs. Vous dites que les imbéciles Spectateurs vont bonnement apprendre des femmes ce qu’ils ont pris ſoin de leur dicter : à prendre vos mots à la lettre, on croiroit vous entendre dire que tous les Spectateurs ont participés à la compoſition de l’ouvrage qu’ils vont entendre, & qu’ils ſont des imbécilles parce qu’ils vont admirer dans la bouche d’une femme les vers qu’ils ont eu la peine de compoſer. Ce n’eſt pas cela que vous avez voulu dire n’eſt-ce pas, c’eſt cependant ce que vous avez dit, cela ne m’empêche pas cependant de deviner vôtre intention, vous avez voulu dire que les femmes n’ont naturellement ni ſens commun, ni esprit, ni génie, ni ſageſſe, ni beaux ſentimens, que les hommes au contraire ſont excluſivement pourvus de tout cela, & qu’il eſt abſolument abſurde d’aller entendre & admirer toutes ces belles qualités dans la bouche des femmes, puisqu’elles ne les ont pas, & que c’eſt dans le cœur des ſeuls hommes qu’elles ont fixé leur domicile. Je ne ſais la quelle des deux abſurdités celle que vous avez dite, ou celle que vous avez voulu dire, eſt la plus pardonnable ? Mais aſſurément vous ne trouverez perſonne qui adopte l’une ou l’autre, puisqu’il y a eu de tout tems & qu’il eſt encore des femmes vertueuſes & diſtinguées par le génie, la ſcience & les talens : On n’a donc pas eu tort de mettre en ſcene des Cénie, des