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où, comme sur un écran, tournoyaient ses souvenirs.

… Elle avait quitté l’Alsace pour venir se placer à Paris, chez un pasteur. Ses premières joies datèrent du moment où elle suivit un cours de français. Pour aller à l’école, elle traversait des rues grouillantes ; au passage, des inconnus lui disaient : « Bonsoir, belle gosse. » Elle s’arrêtait, musardait et rentrait tard chez son maître dont les reproches lui bourdonnaient encore aux oreilles.

Heureusement elle avait trouvé une autre place.

Depuis deux mois, elle travaillait à l’Hôtel du Nord. Ses patrons ne lui faisaient jamais de reproches.

« Je crois que nous avons déniché l’oiseau rare, disait Louise. » Le 14 juillet on l’avait laissée libre. « Allez vous amuser, Jeanne ! »

Réjouissances trop nouvelles, trop proches, pour qu’elle les eût oubliées. Elle entendait encore la voix de Gustave : « En avant, la musique ! » Aussitôt, un jeune homme l’avait invitée et elle était entrée dans la ronde. À Paris, on ne dansait pas comme chez elle ; les hommes vous écrasaient contre eux, vous frôlaient le visage de leurs lèvres qui murmu-