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SUR LE MOUVEMENT

science, et pour en déduire une théorie certaine et lumineuse.

C’est aussi l’objet que je me suis proposé en travaillant à cet ouvrage. Dans le Traité de Dynamique, j’ai eu pour but de réduire au plus petit nombre possible les lois de l’équilibre et du mouvement des corps solides : j’ai tâché de faire ici la même chose pour les fluides.

Il y a cependant une différence essentielle entre la matière que j’ai traitée dans ce Traité de Dynamique, et celle que j’entreprends de traiter dans celui-ci. La mécanique des corps solides n’étant appuyée que sur des principes métaphysiques et indépendans de l’expérience, on peut déterminer exactement ceux de ces principes qui doivent servir de fondement aux autres. La théorie des fluides, au contraire, doit nécessairement avoir pour base l’expérience, dont nous ne recevons même que des lumières fort bornées. Obligés de nous en tenir aux principes qu’elle nous fournit, nos recherches se réduisent à savoir discerner ceux de ces principes qui réunissent à la fois le plus de simplicité et de certitude. Les matériaux de l’édifice nous sont donnés : l’arrangement de ces matériaux et le choix particulier qu’il peut y avoir à faire entre eux, est la seule chose dont nous soyons maîtres de disposer.

Si l’on connaissait la figure et la disposition mutuelle des particules qui composent les fluides, il ne faudrait point d’autres principes que ceux de la mécanique ordinaire, pour déterminer les lois de leur équilibre et de leur mouvement. Car c’est toujours un problème déterminé, que de trouver l’action mutuelle de plusieurs corps qui sont unis entre eux, et dont on connaît la figure et l’arrangement respectif. Mais comme nous ignorons la forme et la disposition des particules fluides, la détermination des lois de leur équilibre et de leur mouvement est un problème, qui, envisagé comme purement géométrique, ne contient pas assez de données, et pour la solution duquel on est obligé d’avoir recours à de nouveaux principes.

Nous jugerons aisément du plan que nous devons suivre dans cette recherche, si nous nous appliquons à connaître d’abord quelle différence il doit y avoir entre les principes généraux du mouvement des fluides, et ceux dont nous avons fait dépendre les lois de la mécanique des corps ordinaires. Ces derniers principes, comme nous l’avons dit ailleurs, peuvent se réduire à trois ; savoir, la force d’inertie, le mouvement composé, et l’équilibre de deux masses égales, animées en sens contraire de deux vitesses virtuelles égales. Nous avons donc ici deux choses à examiner ; en premier lieu, si ces trois prin-