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ÉLÉMENS

qu’on en a faites, et de l’extension plus ou moins grande qu’on lui a donnée.

Les observations astronomiques démontrent que les planètes se meuvent ou dans le vide, ou dans un milieu fort rare, ou enfin, comme l’ont prétendu quelques philosophes, dans un milieu fort dense qui ne résiste pas (ce qui serait néanmoins très-difficile à concevoir) ; mais quelque parti qu’on prenne sur la nature du milieu dans lequel les planètes se meuvent, il est au moins constant, par l’observation, qu’elles ont une tendance vers le soleil. Ainsi la gravitation des planètes vers le soleil, quelle qu’en soit la cause, est un fait qu’on doit regarder comme démontré, ou rien ne l’est en physique. La gravitation des planètes secondaires ou satellites, vers leurs planètes principales, est un second fait évident et démontré par les mêmes raisons et par les mêmes faits. Les preuves de la gravitation des planètes principales vers leurs satellites ne sont pas en aussi grand nombre ; mais elles suffisent cependant pour nous faire reconnaître cette gravitation. Les phénomènes du flux et reflux de la mer, et surtout ceux de la précession des équinoxes, si bien d’accord avec les observations, prouvent invinciblement que la terre tend vers la lune. Nous n’avons pas, du moins jusqu’ici, de semblables preuves pour les autres satellites ; mais l’analogie seule ne suffit-elle pas pour nous faire conclure que l’action entre les planètes et leurs satellites est réciproque ? On peut à la vérité abuser en physique de cette manière de raisonner, pour s’élever quelquefois à des conclusions trop générales ; mais il semble, ou qu’il faut absolument renoncer à l’analogie, ou que tout concourt ici pour nous engager à en faire usage.

Si l’action est réciproque entre chaque planète et ses satellites, elle ne paraît pas l’être moins entre les planètes premières. Indépendamment des raisons tirées de l’analogie qui ont à la vérité moin>> de force ici que dans le cas dont on vient de parler, mais qui pourtant en ont encore, il est certain que Saturne éprouve dans son mouvement des variations sensibles ; et il est fort vraisemblable que Jupiter est la principale cause de ces variations. Le temps seul, il est vrai, pourra nous éclairer pleinement sur ce point, les géomètres et les astronomes n’ayant encore ni des observations assez complètes sur les mouvemens de Saturne, ni une théorie assez exacte des dérangemens que Jupiter lui cause. Mais il y a beaucoup d’apparence que Jupiter, qui est sans comparaison la plus grosse de toutes les planètes, entre au moins pour beaucoup dans la cause de ces dérangemens. Nous disons pour beaucoup et non pour tout ; car outre une cause dont nous parlerons bientôt, l’action des cinq satellites de Saturne pour-