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DE L’ENCYCLOPÉDIE.

à ses vues. Les sciences et tes beaux arts ne peuvent donc trop concourir à illustrer par leurs productions le règne d’un souverain qui les favorise. Poumons, spectateurs de leurs progrès et leurs historiens, nous nous occuperons seulement à les transmettre à la postérité. Qu’elle dise, à l’ouverture de notre dictionnaire : tel était alors l’état des sciences et des beaux-arts ; qu’elle ajoute ses découvertes à celles que nous aurons enregistrées, et que l’histoire de l’esprit humain et de ses productions aille d’âge en âge jusqu’aux siècles les plus reculés ; que l’Encyclopédie devienne un sanctuaire où les connaissances des hommes soient à l’abri des temps et des révolutions : ne serons-nous trop pas flattés d’en avoir posé les fondemens ? Quel avantage n’aurait-ce pas été pour nos pères et pour nous, si les travaux des peuples anciens, des Égyptiens, des Chaldéens, des Grecs, des Romains, etc., avaient été transmis dans un ouvrage encyclopédique, qui eut exposé en même temps les vrais principes de leurs langues ! Faisons donc pour les siècles à venir ce que nous regrettons que les siècles passés n’aient pas fait pour le nôtre. Nous osons dire que si les anciens eussent exécuté une encyclopédie, comme ils ont exécuté tant de grandes choses, et que ce manuscrit se fut échappé seul de la fameuse bibliothèque d’Alexandrie, il eut été capable de nous consoler de la perte des autres.

Voilà ce que nous avions à exposer sur les sciences et les beaux-arts. La partie des arts mécaniques ne demandait ni moins de détails ni moins de soins. Jamais peut-être il ne s’est trouvé tant de difficultés rassemblées, et si peu de secours dans les livres pour les vaincre. On a trop écrit sur les sciences, on n’a pas assez bien écrit sur la plupart des arts libéraux, on n’a presque rien écrit sur les arts mécaniques ; car qu’est-ce que le peu qu’on en rencontre dans les auteurs, en comparaison de l’étendue et de la fécondité du sujet ? Entre ceux qui en ont traité, l’un n’était pas assez instruit de ce qu’il avait à dire, et a moins rempli son sujet que montré la nécessité d’un meilleur ouvrage ; un autre n’a qu’effleuré la matière, en la traitant plutôt en grammairien et en homme de lettres qu’en artiste : un troisième est à la vérité plus riche et plus ouvrier, mais il est en même temps si court que les opérations des artistes et la description de leurs machines, cette matière capable de fournir seule des ouvrages considérables, n’occupe que la très-petite partie du sien. Chambers n’a presque rien ajouté à ce qu’il a traduit de nos auteurs. Tout nous déterminait donc à recourir aux ouvriers.

On s’est adressé aux plus habiles de Paris et de la France